Tenez bon dans la vigilance spirituelle, parce que vous ne savez pas quand le Seigneur vous appellera à Lui-même. Dans votre vie terrestre soyez prêts à tout moment à lui rendre des comptes. Méfiez-vous que l'Ennemi ne vous attrape dans ses filets, qu'il ne vous trompe en vous faisant tomber dans la tentation. Faites quotidiennement votre examen de conscience; essayez de purifier vos pensées, vos intentions.
Il était un roi qui avait un mauvais fils. N'ayant pas d'espoir qu'il change pour le mieux, le père condamna à mort le fils. Il lui donna un mois pour se préparer.
Le mois s'écoula, et le père convoqua le fils. À sa grande surprise, il vit que le jeune homme avait sensiblement changé: son visage était maigre et tiré, et tout son corps ressemblait à celui de quelqu'un qui avait souffert.
"Comment est-il possible qu'une telle transformation soit intervenue en toi, mon fils?" demanda le père.
"Mon père et mon seigneur, répondit le fils," comment pouvais-je ne pas changer lorsque chaque jour qui passait me rapprochait de la mort? "
"Bon, mon fils," dit le roi. "Puisque tu as évidemment retrouvé tes sens, je te pardonne. Cependant, tu dois te maintenir dans cette disposition vigilante de l'âme pour le reste de ta vie."
"Père, répondit le fils," c'est impossible. Comment puis-je résister aux séductions et aux tentations innombrables?
Alors le roi ordonna qu'un récipient plein d'huile soit apporté, et il dit à son fils: "Prends ce récipient et transporte-le dans toutes les rues de la ville. Te suivront deux soldats avec des épées tranchantes Si tu renverses ne serait-ce qu'une seule goutte, ils te couperont la tête. "
Le fils obéit. A pas légers, prudents, il marcha le long de toutes les rues, les soldats l'accompagnaient, et il ne renversa pas une seule goutte.
Quand il revint au château, le père demanda: "Mon fils, qu'as-tu vu lorsque tu étais à pied à travers la ville?"
"Je n'ai rien vu."
"Que veux-tu dire, rien?" dit le roi.
"Aujourd'hui est jour férié, tu as dû voir les étals de toutes sortes de bibelots, beaucoup de voitures, les animaux, les gens ..."
"Je n'ai rien remarqué de tout cela," dit le fils. "Toute mon attention était centrée sur l'huile dans la cuve. J'avais peur de renverser une goutte et de perdre ainsi ma vie."
"Tu as raison, mon fils, dit le roi. "Garde à l'esprit cette leçon pour le reste de ta vie. Sois aussi vigilant avec ton âme comme aujourd'hui tu le fus avec l'huile dans le récipient. Tourne tes pensées loin de ce qui bientôt disparaîtra, et les garde concentrées sur ce qui est éternel. Tu seras suivi, non pas par des soldats armés, mais par la mort à laquelle nous nous rapprochons tous les jours. Sois très prudent pour garder ton âme de toutes les tentations ruineuses. "
Le fils obéit à son père, et il vécut heureux.
Veillez, demeurez fermes dans la foi, soyez des hommes, soyez forts. (ICor. 16:13).
L'Apôtre donne aux chrétiens ce conseil important pour attirer leur attention sur le danger de ce monde, pour leur enjoindre de faire un examen fréquent de leur cœur, parce que sans celui-ci, on peut facilement causer la ruine de la pureté et de l'ardeur de sa foi, et insensiblement passer du côté du mal et de l'incrédulité.
Tout comme une préoccupation fondamentale est d'être attentif à tout ce qui pourrait être nocif pour notre santé physique, de même nos préoccupations spirituelles devraient se méfier de tout ce qui pourrait nuire à notre vie spirituelle et au travail de la foi et du salut. Par conséquent, évaluez avec soin et attention vos impulsions intérieures: sont-elles de Dieu ou de l'esprit du mal? Méfiez-vous des tentations de ce monde et de gens du monde; méfiez-vous des tentations intérieures cachées qui viennent de l'esprit d'indifférence et de négligence dans la prière, du déclin de l'amour chrétien.
Si nous tournons notre attention à notre esprit, nous remarquons un torrent de pensées et d'idées successives. Ce torrent est ininterrompu, c'est la course partout et à tout moment: à la maison, à l'église, au travail, quand nous lisons, quand nous conversons. C'est généralement appelé la pensée, écrit l'évêque Théophane le Reclus, mais en fait c'est une perturbation de l'esprit, une dispersion, un manque de concentration et d'attention.
La même chose arrive avec le coeur. Avez-vous déjà observé la vie du cœur? Essayez, même pour un court laps de temps, et voyez ce que vous trouvez. Quelque chose de désagréable se produit, et vous êtes irrité; un malheur se produit, et vous vous plaignez, vous voyez quelqu'un que vous n'aimez pas, et l'animosité se fait jour en vous, vous rencontrez l'un de vos égaux qui vous a maintenant distancé dans l'échelle sociale, et vous commencez à l'envier, vous pensez à vos talents et capacités, et vous commencez à devenir fier...
Tout cela est pourriture: la vaine gloire, le désir charnel, la gourmandise, la paresse, la malveillance, l'une sur l'autre, détruisent le cœur. Et tout cela peut passer par le coeur en quelques petites minutes. Pour cette raison, une ascète, qui était extrêmement attentif à lui-même, avait tout à fait raison de dire que "le cœur de l'homme est rempli de serpents venimeux. Les cœurs des saints seulement sont exempts de ces serpents, que sont les passions."
Mais cette liberté n'est atteinte que par un processus long et difficile de connaissance de soi, de travail sur soi et en étant vigilants dans la vie intérieure, c'est-à-dire, en l'âme.
Soyez prudent. Veillez sur votre âme! Tournez vos pensées loin de ce qui sera bientôt passé, et tournez-les vers ce qui est éternel. Là vous trouverez le bonheur que votre âme cherche, dont votre cœur a soif.
Saint Jean Maximovitch
Version française Claude Lopez-Ginisty d'après
OTHODOX AMERICA, vol. XIV, n ° 2-3, September-October 1993