Quand je repris conscience, je me trouvai déjà couché sur un lit dans une salle d'hôpital.
En ouvrant les yeux, je me suis vu entouré de prèsque toute une foule de gens curieux, ou autrement dit, par des visages qui m'observait avec une attention soutenue.
A mon chevet le médecin-chef était assis sur un tabouret qui avait été déplacé sur vers mon lit, essayant de préserver son air de grandeur. Sa posture et sa manière d'être semblaient dire que tout cela était seulement un phénomène fréquent, et qu'il n'y avait rien d'étonnant à ce sujet, mais dans le même temps, l'attention soutenue et la confusion pourrait se lire dans ses yeux qui étaient fixés sur moi.
Le jeune médecin-t-il, bien sûr, sans aucune réserve que ce soit, s'est littéralement accroché à moi avec ses yeux, comme s'il essayait de pénétrer à travers moi.
Au pied de mon lit, vêtue d'habits de deuil, avec un visage pâle et nerveux, se tenait ma sœur, et à côté d'elle, mon beau-frère; derrière ma sœur le visage relativement plus calme de l'infirmière de l'hôpital, et encore plus loin derrière elle, la physionomie complètement effrayée de notre jeune assistant chirurgien était visible.
Ayant totalement retrouvé mes esprits, j'ai tout d'abord accueilli ma sœur. Elle est rapidement venue, m'a embrassé et elle a commencé à pleurer.
"Eh bien, mon cher, vous nous avez certainement effrayés!" le jeune médecin parlait avec cette impatience de partager dès que possible mes impressions et mes observations extraordinaires, ce qui est caractéristique de la jeunesse. "Si seulement vous saviez ce qui vous est arrivé!"
"Mais, je me rappelle tout ce qui m'est arrivé," dis-je.
"Comment cela? Est-il possible que vous n'ayez pas perdu conscience?"
"Apparemment pas!"
"C'est très, voire extrêmement étrange," dit-il, en regardant le médecin-chef. "C'est étrange parce que vous étiez couché comme une tige végétale inerte, sans donner le moindre signe de vie, nulle part, même pas le plus petit soupçon de vie. Comment est-il possible de préserver la conscience dans un tel état? "
"Evidemment pourtant," c'est possible, puisque j'ai à la fois vu et été conscient de tout.
"Quant à ce qui concerne le fait de voir, vous ne pouviez rien voir, mais seulement entendre et ressentir. Et avez-vous vraiment tout entendu et compris? Vous avez entendu comment ils vous ont lavé et habillé...?"
"Non, je n'ai rien senti de cela. En général, j'étais complètement insensible à mon corps."
"Comment cela peut-être? Vous dites que vous vous rappelez tout ce qui a eu lieu vous concernant, mais que vous n'avez rien ressenti?"
"Je dis que je n'ai rien ressenti pas de ce qui a été fait avec mon corps, étant sous la forte influence de de l'expérience que je vivais alors," ai-jedit, en pensant que ce genre d'explication était totalement suffisant pour comprendre ce que je disais.
"Eh bien?"... dit le docteur, voyant que je m'interrompai.
Là, je faiblis un instant, ne sachant pas quoi d'autre était exigé de moi. Il semblait que tout était si clair, et de nouveau, je n'ai fait que répéter:
"Je vous ai dit que je ne ne me sentais pas mon corps, et donc tout ce qui était en rapport avec lui. Bon, mon corps n'est pas tout mon être, n'est-ce pas? Et, ce n'était pas mon être tout entier qui se trouvait là comme un tige figée. Le reste de mon être a vécu et a continué à fonctionner en moi", ai-je ajouté. Je pensais que cette division ou, plus exactement, la divisibilité dans mon individualité qui aujourd'hui était plus évidente pour moi qu'un jour de Dieu, était tout aussi évidente pour les personnes à qui j'adressais mes paroles.
Evidemment je n'étais pas encore entièrement revenu à mon ancienne vie, ne me rangeant plus à leur point de vue, et en parlant de ce que je savais et que je ressentais maintenant, je ne comprenais pas que mes paroles semblaient presque être comme le délire d'un fou à ceux qui, eux-mêmes, n'aient pas connu une telle expérience et l'a rejetaient comme étant fausse.
Version Française Claude Lopez-Ginisty
d'après
Orthodox Life
Vol. 26, No. 4
Holy Trinity Monastery
Jordanville, N.Y.
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